Économie sociale
L’évolution de l’entreprise La Grande Table, au bénéfice de la communauté
31/05/2024
Économie sociale
31/05/2024
Créée en 1991, La Grande Table répond depuis à un besoin criant dans la population sherbrookoise, en offrant des repas gratuits ou à prix modiques à des familles et enfants dans le besoin. Plus de trente ans après sa création, l’organisme à but non lucratif a vu ses services se développer, répondant ainsi à une plus grande clientèle. Entreprendre Sherbrooke s’est rendu récemment sur place pour constater tout le travail qu’accompli quotidiennement cette équipe de gens passionnés.
Son nom est plutôt connu dans la population sherbrookoise, mais est-ce que sa mission est bien comprise? C’est qu’il y a plusieurs organismes communautaires sur le territoire qui viennent en aide aux personnes plus démunies. La Grande Table en fait partie, mais sa mission vise principalement les familles et les élèves en situation de pauvreté, en livrant des repas et des collations dans 13 écoles primaires de Sherbrooke et en offrant à la communauté la possibilité d’acheter des repas congelés à faible coût (1 $ à 5 $, selon les revenus) grâce à son comptoir pour emporter, un concept créé pendant la pandémie.
Depuis les dernières années, le visage de la clientèle desservi par La Grande Table a changé et la demande a carrément explosé, autant pour les services offerts dans les écoles que pour ceux offerts à la communauté dans le besoin. « La réalité, c’est qu’en 2018, on servait 50 000 repas par année. À l’époque, l’équipe croyait qu’une fois les 100 000 repas atteints, l’organisme ne pourrait pas faire plus, mais aujourd’hui, nous dépassons les 200 000 repas par année », raconte Vincent Boutin, directeur général de La Grande Table depuis un an.
Par exemple, le nombre de repas congelés servis au comptoir de La Grande Table est passé de 45 000 en 2020-21 à plus de 87 000 en 2023-24. Quant aux boites à lunch gratuites offertes aux élèves dans le besoin, le nombre est passé de 21 000 à 48 000 en quatre années.
Les effets de la pandémie, l’augmentation des prix des aliments, le coût de plus en plus élevé des logements, ainsi que le déclin de la classe moyenne expliquent en grande partie cette fulgurante augmentation.
Sur place, dans la cuisine de La Grande Table, les employé.es s’affairent à préparer des plats pour des centaines de personnes, sous la responsabilité de la cheffe bien connue à Sherbrooke Mélanie Alain (L’Empreinte cuisine soignée, Ça Beigne). Par exemple, jeudi matin, pas moins de 845 repas ont été livrés dans les écoles. Notons que La Grande Table dessert présentement 13 des 38 écoles primaires de Sherbrooke.
Deux services pour les enfants du primaire sont offerts par La Grande Table. D’abord, les «Écono lunchs» ; il s’agit de repas livrés directement à la cantine des écoles. Les parents déboursent ce qu’ils souhaitent/peuvent pour chaque repas. Quant aux « P’tites boites à lunch », il s’agit de collations et de repas chauds servis à des enfants plus démunis, référés par la direction des écoles. Ce service touche présentement 320 élèves.
« Notre objectif est d’offrir des boites à lunch dans l’ensemble des écoles de Sherbrooke et entrer aussi dans les écoles secondaires », souligne Vincent, précisant que ces services peuvent être offerts grâce à la collaboration des organismes suivants : Fondation Christian Vachon, Fondation Rock-Guertin, La Cantine pour tous, ainsi que les dons amassés lors de la campagne annuelle de financement de La Grande Table.
Dans les dernières années, La Grande Table a pris un virage. « Nous étions auparavant un restaurant populaire, mais en raison de la COVID, on a dû se réinventer avec la création d’un comptoir pour emporter. Tout est fait maison, à l’exception de quelques produits provenant de partenariats, comme Agropol et Starbucks, qui nous donnent leurs invendus », explique le directeur général.
Le prix des portions varie de 1$ à 5 $, selon les revenus. Un tarif intermédiaire de 2,75 $ a aussi été fixé, après avoir constaté des changements importants au niveau de la clientèle. Cette clientèle est composée de personnes seules, d’ainé.es, de nouvelles et nouveaux arrivant.es et de familles en situation de pauvreté. Depuis un certain temps, on ajoute aussi à la liste des demandes adressées par des gens de la classe moyenne.
Mais l’augmentation du nombre de repas distribués s’explique-t-elle entièrement par une hausse des besoins? Pas tout à fait, répond le directeur général. Elle s’explique aussi par une offre de services mieux adaptée, qui permet donc de répondre à une plus grande demande. Depuis un an, La Grande Table a pris le virage de l’économie sociale, dans le but de générer des revenus autonomes (environ 40% dans la dernière année). Le tarif solidaire est un bel exemple de ce virage. En effet, la population en général peut aussi bénéficier du service alimentaire et se procurer des repas congelés au coût de 5 $.
« La Grande Table est l’exemple parfait d’une entreprise d’économie sociale », explique Arielle Drissen, conseillère stratégique en développement de l’économie sociale chez Entreprendre Sherbrooke. « Ses activités de vente de plats cuisinés permettent, par une tarification solidaire, de répondre à un besoin criant en donnant accès à une nourriture saine à toutes et à tous, en plus d’offrir un service à la population en général », poursuit-elle.
Ce virage a d’ailleurs grandement contribué à la réalisation de récents investissements, soit l’achat de nouveaux équipements et l’agrandissement de la cuisine. Les employé.es bénéficient aussi de formations en continu. D’autres projets sont présentement en réflexion, dont la possibilité d’avoir un deuxième point de production.
Le directeur général en place depuis un an voit les nombreuses possibilités pour l’organisme à but non lucratif. Celui qui a siégé comme conseiller municipal pour la Ville de Sherbrooke pendant huit ans se trouve choyé dans ses nouveaux défis. « Ici, on ne se demande pas pourquoi on se lève le matin! On offre un service à la communauté, sans juger la clientèle. Puis, bien manger, c’est un vecteur de persévérance à l’école. »
Notons que l’équipe compte tout près de 30 employé.es, dont des personnes en réinsertion sociale qui bénéficient d’un suivi pour bien réussir cette réinsertion. En moins d’un an, six nouveaux postes ont été créés.
Envie d’en savoir plus sur La Grande Table, ses horaires et ses différents services? Rendez-vous ici.
Sur la photo, de gauche à droite, Karine Godbout, directrice adjointe, Mélanie Alain, cheffe cuisinière, et Vincent Boutin, directeur général de La Grande Table.